Joseph Mégard 1850-1918



Joseph Mégard en 1891 - autoportrait

Autoportrait de 1891


Biographie

Joseph est né à Carouge (Genève) en 1850. Il est le troisième de huit enfants nés entre 1849 et 1858, dont quatre seulement sont devenus adultes. Il est décédé à Plainpalais (Genève) en 1918. Sa mère Marie Chardon était lingère puis épicière. Son père Jacques était boucher et guillocheur, et petit cousin du Cardinal Mermillod.
Son frère Henri est parti à Paris puis à Turin. Marié à Caroline Sadoux, ils eurent une fille, Juliette Adèle (1886-1939).



Juliette-Adèle Mégard

Juliette Adèle en 1912 



Exposition consacrée à Joseph Mégard en décembre 1964 à la galerie Muriset

Exposition «réunissant des dessins originaux et des gravures (eaux-fortes et pointes-sèches) de Genève et environs ainsi que des aquarelles, dessins et huiles du Valais».

Notes d’après l’introduction faite par Monsieur Alexandre Kunz, un ami de la famille Mégard, à l’occasion du vernissage de l’exposition  le jeudi 10 décembre 1964 à 18h15.
Comme je suis probablement parmi les dernières personnes qui ont connu l’artiste Joseph Mégard, Mademoiselle Muriset m’a prié de faire ce soir une courte introduction.
Madame Mégard était ma marraine et nos familles se sont très souvent rencontrées. Mon souvenir le plus lointain remointe à 1890, alors que j’avait six ans. Par un beau jeudi, je courattais et je suis tombé dans le canal de Carouge, assez boueux. Ma mère m’a vite conduit chez les Mégard qui habitaient au 114 rue de Carouge, la maison juste avant le pont et Joseph Mégard m’a prêté sa robe de chambre pendant qu’on réparait le désordre vestimentaire !
Je suis retourné bien souvent chez eux et j’étais émerveillé devant les oeuvres se trouvant dans l’atelier que Joseph Mégard avait chez lui. En artisan libre, il gravait toute la journée, d'abord commercialement : des plaques de portes, des médailles, des alliances, etc., mais, poussé par l'amour du dessin, il se mit à dessiner des vues de la ville, puis à les graver sur cuivre.
En général, il dessinait d'après nature, mais parfois, pour des vues plus anciennes, il se basait sur des photographies ou d'autres documents. Il reconstitua ainsi, des vues de la Genève d'autrefois : monuments, fontaines, coins pittoresques et caractéristiques.
Grâce à lui donc, il reste une collection précieuse et bien exécutée de vues représentant en général la Genève du XIXème siècle.
Il gravait en général à l'eau-forte. C'étaient de ravissants dessins qu'il pouvait reproduire en assez grand nombre et qui alors ne coûtaient pas cher. J'ai toujours devant les yeux la belle vue de la Corraterie (une pointe sèche sauf erreur), les arbres des Bastions, le temple de la Madeleine avant sa réfection, etc. C'est une riche collection qui trouvera toujours des amateurs car c'est réellement du beau travail.
Dès qu'il faisait beau temps, Joseph Mégard sortait avec un chevalet car il avait été disciple de Bartélémy Menn ; il allait peindre à l'huile les bords de l'Arve si pittoresques, les bords de l'Aire, rivière sinueuse qui serpentait entre les bosquets alors intouchés, mais, depuis ce temps, cette rivière a été canalisée et massacrée !
Nous avons encore de Mégard, les rives du lac vers Bellerive, des vues prises au pied du Salève, de Champel, etc., le tout d'une peinture attentive, sérieuse, propre, mais, voulant magnifier la nature dans un coloris modéré. Comme à cette époque on discutait beaucoup au sujet de Hodler, Mégard a évolué et il mit plus d'accent, de couleur et de relief dans ses tableaux. Passant en général l'été en Valais, à Liddes principalement, où il séjourna près de six-sept ou dix-huit ans, il fit là-bas des oeuvres remarquables : des dessins, et surtout des aquarelles et des huiles : le village de Liddes, son église, ses environs, Dranse, le val d'Arpette, etc. Ces aquarelles ont beaucoup de fraîcheur et il a fait aussi de ravissants dessins de caractère rustique : paysannes aux champs, femmes du village à la fontaine, faneuses, etc. Les municipalités de Liddes et de Martigny ont acheté il y a deux ans, une belle collection de ses oeuvres valaisannes.
Joseph Mégard était un esprit rêveur et poète, ayant une vie réglée et calme. Il a été bien entouré par Madame Caroline Mégard, née Sadoux (le manuscrit porte "Ladoux"), institutrice maniant les vers. Madame Mégard a écrit plusieurs romans qui ont passé en feuilleton dans le Journal de Genève, mais, atteinte de la poitrine, elle mourut prématurément. Sa fille Juliette, très artiste et excellente pianiste, a soutenu son père de toute son affection avant d'épouser le bon compositeur et pianiste Louis Piantoni, directeur de choeur de l'Ecole artistique de musique, institution qui a eu un beau retentissement.
Après la mort de sa femme Juliette, Louis Piantoni a eu la chance d'épouser Mademoiselle Chatron qui se dévoue pour faire connaître les oeuvres de son mari et cherche aussi à faire revivre le trésor artistique de Joseph Mégard, cet homme modeste qui n'a jamais su se faire valoir ni rechercher la notoriété pour ses oeuvres de valeur. Mégard n'a pas fait fortune malgré la richesse et l'ampleur de son oeuvre mais à cause, principalement, de son désintéressement et de sa grande (peut-être trop grande) modestie.
Ainsi va la vie !

Le carton d’invitation pour le vernissage de l’exposition reproduit en petit l'autoportrait de 1891.

A l'occasion de cette exposition, des articles ont parus dans la Tribune de Genève les 28 décembre 1964 et 9-10 janvier 1965. Le 14 septembre 1949, un article du même journal reproduisait un dessin de la cathédrale.


Exposition au Molard en 1976
Annie Muriset « invite à venir admirer une présentation … consacrée à des dessins originaux de trois artistes de Genève », Jean-Antoine Linck, Jules Hébert et Joseph Mégard. Jean Troesch écrit dans le Journal de Genève du 10 décembre 1976 : « Jules [sic] Mégard a dessiné puis gravé avec précision et talent la Genève du XIXe siècle. Il dessina depuis l’âge de huit ans et chercha les endroits les plus pittoresques de notre ville. Ainsi nos sont parvenus la Tour maîtresse (malheureusement démolie), la synagogue et l’église russe entourées chacune de terrains vagues, la rue Farel pleine de charmes, l’ancien quai du Seujet, le bastion de Saint-Antoine et le Collège, les moulins David, incendiés le 8 septembre 1874. Qui veut voir les aspects divers de notre cité au moment de la suppression des fortifications et dans les années qui suivirent, se doivent de voir l’héritage laissé par Mégard. »


Dictionnaire des artistes suisses
(C. Brun, II, p. 348, Frauenfeld, Von Huber, 1908)

Peintre graveur, né à Carouge le 21 nov. 1850. Ses premières leçons de dessin lui ont étés données par le peintre Gevril au collège de Carouge, puis il entra dans l’atelier de gravure décorative de Jean-Pierre Charlier. Sur l'instigation de Marcelin Desboutin, il fit ses premières pointes sèches dont la plus goûtée représente "Les terrasses de la Corraterie." Il se mit alors à l’eau-forte. Il a gravé 182 planches dont 96 représentent des vues de Genève ancienne et moderne (collection complète au Musée des Arts décoratifs de Genève). Une grande pointe sèche, "La Jonction le soir", a été acquise pas la Confédération en 1896. Ce artiste a fait également de nombreux tableaux et études à l’huile aux environs de Genève, en Valais, à Gruyère, en Algérie et en Tunisie. (P. Veillon).



Joseph Mégard est aussi mentionné dans le Dictionnaire historique et biographique de la Suisse, 1928.